Parlez-vous le Super Mario ? La métaphore langagière mise à l’épreuve en recherche-jeu-création

  • Barnabé, F. (Orateur)
  • Dupont, B. (Orateur)
  • Hurel, P. (Orateur)
  • Julie Delbouille (Orateur)
  • Pierre-Yves Houlmont (Orateur)
  • Hamza Bashandy (Orateur)
  • Boris Krywicki (Orateur)
  • Björn-Olav Dozo (Orateur)

Activité: Participation ou organisation d'un événementParticipation à un Colloque, une journée d'étude

Description

Le jeu vidéo étant de plus en plus désigné comme un média (et non plus seulement comme un jouet), il est devenu courant de le penser comme un acte de communication (Bonenfant, 2015) voire de le désigner comme un (ensemble de) langage(s). La publication et la popularité de différents outils créatifs de jeux vidéo — particulièrement les éditeurs de niveaux tels que Super Mario Maker ou MegaMan Maker — tendent à renforcer cette idée. En effet, ces dispositifs mettent généralement à disposition du public un ensemble d’éléments que l’utilisateur n’a qu’à sélectionner et à disposer dans son niveau en cours de création pour qu’ils soient fonctionnels. Ces éléments sont bien souvent des assemblages d’images, de sons, mais aussi de règles qui régissent les interactions entre les éléments et avec le joueur. Pour filer la métaphore langagière : ces règles sont analysables comme des lignes de programmation, mais aussi, et surtout, comme des règles de syntaxe et de grammaire constituant ainsi un langage formel. Dans cette communication, nous souhaitons rapporter les résultats d’un dispositif de recherche-jeu-création collective ayant mis cette métaphore langagière à l’épreuve. En nous basant sur les apports de la rhétorique (Groupe μ, 1982 ; Bonhomme, 2014 ; Klinkenberg, 2000 ; Charles, 1977 ; entre autres) et sur les précédentes adaptations de concepts de linguistique aux game studies (qui ont notamment mené au développement de la notion de « ludème » ; Lessard et Therrien, 2015), nous tâcherons de développer différentes figures de rhétorique au sein du jeu Super Mario Maker. Outre la reproduction, à l’aide de ce jeu, des figures littéraires classiques — telles qu’elles ont notamment été définies par le Groupe μ dans l’ouvrage Rhétorique générale (1982) — nous nous concentrerons principalement sur la production de figures de style proprement interactionnelles et vidéoludiques, voire propres au langage de Mario. Nos recherches créatives préliminaires nous ont permis de produire des figures de syntaxes (celles que le Groupe μ rassemble sous le concept de « métataxes » : anacoluthes, ellipses, reprises, chiasmes, etc. ; 1982 : 67-90) et des figures de logique (ou « métalogismes » : allégories, ironie, etc.). Certaines figures communes au langage écrit semblent cependant résister au dispositif, telles que la métaphore ou l’inversion. Dans un second temps, nous tâcherons de formaliser différents processus permettant de créer des figures proprement vidéoludiques au sein de Super Mario Maker (des « calembours vidéoludiques », des figures d’injouabilité ou de non-interactivité…) tout en utilisant ces figures pour éclairer, en retour, la grammaire interne du jeu mobilisé. En effet, « les constructions figurales se manifestent par des marquages qui les détachent de leur cadre de discours » (Bonhomme, 2014 : 31). En d’autres termes, une figure ne peut « présenter un relief » que par rapport à un cadre qui présente certaines régularités : une métaphore n’est perceptible que parce qu’elle vient rompre une isotopie sémantique, une anacoluthe ne l’est que parce qu’elle vient fracturer la prévisibilité de la syntaxe, l’ironie ne se comprend que par rapport à un contexte d’énonciation, etc. La conceptualisation de figures vidéoludiques suppose donc la mise au jour de ces régularités et de ces conventions, c’est-à-dire une compréhension plus fine des règles langagières propres à chaque jeu. Au terme de cette recherche, en nous basant sur les résultats du dispositif décrit, nous évaluerons la pertinence, les intérêts, mais aussi les limites de la désignation du jeu vidéo — et plus précisément, ici, de la franchise Mario — comme relevant d’un « langage ». Nous chercherons à déterminer ce que cette métaphore permet de soumettre à l’analyse, mais aussi ce qu’elle empêche de prendre en considération. Enfin, cette problématisation s’accompagnera d’une réflexion sur la pertinence du dispositif de recherche-jeu-création, sur sa réplicabilité et sa pertinence pour le domaine des sciences du jeu.
Période25 oct. 2019
Type d'événementColloque
LieuLausanne, SuisseAfficher sur la carte
Niveau de reconnaissanceInternational

mots-clés

  • jeux vidéo
  • sciences du jeu
  • game studies
  • rhétorique
  • figure de style
  • langage
  • Super Mario Maker