Pratiques et usages de la neutralité en temps de paix. Analyse à partir de l'expérience diplomatique du Cameroun, 1960-2010

Résumé

Plusieurs concepts sont souvent utilisés pour catégoriser et qualifier la politique étrangère du Cameroun. Ces concepts, issus souvent des slogans et des discours politiques ou des manifestes du parti au pouvoir sont souvent repris par les chercheurs en vue de donner un sens au comportement du Cameroun sur la scène internationale. Ainsi a-t-on entendu parler de « diplomatie de présence et de participation ». Ces concepts peinent pourtant à rendre effectivement compte du cheminement diplomatique du Cameroun sur la scène internationale, certains notant que c’est une diplomatie quelques fois présente mais très souvent absente. Face à ce hiatus, la présente étude se propose de cerner la trajectoire diplomatique du Cameroun à l’aune de ses interactions quotidiennes. A partir de ces interactions, cette thèse vise à montrer que le cheminement diplomatique du Cameroun (1960-2010) peut être appréhendé à partir du concept de neutralité. Cependant, la neutralité est historiquement utilisée pour décrire uniquement la politique étrangère de certains « petits » Etats européens face aux guerres. Ainsi, s’est posée la question de savoir comment un Etat issu de la colonisation peut relever de cette catégorie, en contexte de paix. En nous fondant sur un substrat théorique constructiviste, nous avons remis en cause le déterminisme géographique accolé à la neutralité pour montrer qu’il s’agit d’un concept non-collatif qui évolue et se décline au gré des situations, y compris en contexte de paix. L’interdiction du recours à la force, loin d’annuler les rapports antagoniques a simplement pour effet de les transférer du militaire au diplomatique. La paix n’exclut pas les confrontations et les rivalités diplomatiques entre Etats. Dans le cas du Cameroun, la neutralité est une logique d’action non-linéaire qui se matérialise tantôt par la mobilisation opportuniste des principes de l’Organisation des Nations Unies (Non- ingérence, Obligation de résolution pacifique des différends…), tantôt par le recours à des positions politiques comme le « Non-alignement », la coopération sans exclusive, ou des politiques de désaffiliation vis-à-vis de certaines puissances. La neutralité diplomatique du Cameroun se décline ainsi aussi bien sur le plan multilatéral, régional que bilatéral. Elle s’insère dans la trajectoire historique comme un mécanisme de subjectivation, d’affirmation statutaire et identitaire. Dans ce sens, elle est une stratégie d’action rationnalisée participant au projet de construction nationale. Mais, nous avons aussi pu voir que le positionnement diplomatique du Cameroun résulte aussi des interactions administratives non juridicisées, et du processus de construction d’une diplomatie de métier.

la date de réponse	6 sept. 2022
langue originale	Français
L'institution diplômante	Universite de Namur
Superviseur	Thierry Braspenning-Balzacq (Promoteur), Bruno Colson (Président), Michel Liégeois (Jury), Elena AOUN (Jury) & Nadine Machikou (Jury)