Les déterminants d'un départ à la retraite

  • Virginie Lambert

Student thesis: Master typesMaster en sciences de gestion

Résumé

La retraite est la période à partir de laquelle une personne active décide de se retirer de la vie professionnelle. Le travailleur peut le faire de manière anticipée ou non. L’âge légal de la pension au sein de l’Union européenne oscille entre 60 et 67 ans. Dans de nombreux cas, le travailleur décide de partir en retraite avant d’y arriver. Notre recherche s’est axée autour de la question suivante : « Quels sont les déterminants d’un départ à la retraite ? ».

La littérature scientifique et économique s’arrête souvent sur les aspects financiers (Gruber et Wise, 1999). Néanmoins, il existe bien d’autres raisons qui peuvent pousser un individu à prendre sa pension. Bien que des différences peuvent exister entre pays, une explication peut se trouver dans l’analyse du marché du travail sous l’aspect de l’offre ou de la demande. Notre recherche se penche du point de vue du travailleur dans l’offre du travail à travers les individus et dans la prolongation des travaux de recherches de Debrand et Blanchet (2007), Debrand et Lengagne (2007) et Debrand et Sirven (2009a, 2009b), ci-après dénommés « travaux de recherches de Debrand et al ».

Le choix du moment où l’individu décide de partir à la retraite découle de l’arbitrage entre le loisir et le travail, la santé, les contraintes financières et autres contraintes (par exemple : la situation familiale, la situation professionnelle du partenaire, l’espérance de vie,…).

Un courant de la littérature détermine les barèmes comme étant déterminant pour un départ à la pension. Le comportement des travailleurs semble être affecté en cas de réforme future tels que l’augmentation de l’âge ou du montant de la pension (Blöndal et Scarpetta, 1998; Duval, 2003). Un autre courant identifie l’état de santé en particulier l’incapacité de travailler comme motif de départ anticipé à la retraite (Currie et Madrian, 1999 ; Dwyer et Mitchell, 1999 ; Kreider, 1999). De mauvaises conditions de travail ou une non-satisfaction sont également d’autres déterminants pour un départ à la retraite (Debrand et Lengagne, 2007). De plus, au fil des années, de nombreux métiers pénibles ont disparu, ceux-ci sont souvent exercés par d’autres travailleurs à l’étranger ou ont été remplacés par la technologie. Cependant, de nouvelles formes de « pénibilité » au travail ont vu le jour et ont également un poids dans la décision de prise de retraite (Askenazy et Caroli, 2002). Parmi les nouvelles formes se trouvent notamment, le stress, les horaires imprévisibles, le fait de ne jamais « déconnecter » du monde du travail car le travailleur reste connecté avec celui-ci, la pression continue à travers de nouveaux objectifs chaque fois de plus en plus difficile à atteindre,…

Les travaux de recherches de Debrand. et al (2007, 2009) ont également identifié les déterminants suivants :
- Pour continuer à travailler : une bonne santé, un conjoint travaillant et pas d’aide à une personne externe au ménage ;
- Pour passer la retraite : l’âge, le niveau d’éducation, la situation familiale, la situation professionnelle et la non-satisfaction au travail. Dans certains cas, l’anticipation de futures réformes peut impacter cette décision.

Notre recherche consistait à étudier les facteurs déterminants pour qu’un individu décide de partir à la retraite. Pour ce faire, nous avons dans un premier temps parcouru la littérature existante. Ensuite, nous avons constitué notre base de données avec les informations disponibles à travers les enquêtes Share des années 2015 et 2017. Pour finir, nous avons voulu réactualiser une partie des travaux de recherches de Debrand et al (2007, 2009) pour déterminer si les déterminants étaient toujours semblables ou non.

Un premier problème est survenu dans l’élaboration de notre recherche : toutes les variables identifiées par Debrand et al (2007, 2009) n’ont pu être reconstituées avec notre base de données. Cependant, nous avons identifié d’autres variables explicatives sur base de la littérature existante.

Nous avons retenu deux modèles Probit : l’un avec toutes nos variables explicatives nommé Modèle 1 et l’autre omettant les pays nommé Modèle 2. Ces deux modèles ont des résultats très similaires et ont été mis en comparaison avec les travaux de Debrand (2007, 2009).
Au vu de nos tests d’hypothèses et de notre R² de Mc Fadden, nos modèles semblaient être de bonne qualité. Toutefois, lorsqu’on regarde de plus près le pouvoir de prédiction de nos modèles, nous constatons que très peu de cas sont correctement prédits (où l’individu est parti à la retraite) à travers nos modèles (respectivement 49% et 41%).

Cependant, nous avons pu tirer plusieurs conclusions de notre recherche :
• Lorsque nous comparons les résultats de nos modèles avec la littérature scientifique, les effets attendus ne sont pas toujours ressentis de la même manière. En effet, au vu des connaissances existantes sur le domaine, il nous semble étonnant que nos modèles prédisent une diminution de la probabilité de partir en retraite lorsque l’individu craint que sa santé ne limite son travail à l’avenir. Ceci va à l’encontre des résultats des travaux de recherches de Debrand et al (2007, 2009).
• À contratio, certains effets attendus ont été confirmés par notre étude. Par exemple, la crainte de perdre son emploi diminue la probabilité de prendre sa retraite anticipativement. Nos conclusions vont dans le même sens que les travaux de Debrand (2007, 2009).
• Concernant les effets de l’état de santé, nos modèles n’ont pas utilisé exactement les mêmes variables explicatives que celles reprises dans les travaux de Debrand et al (2007, 2009). Cependant, nos conclusions sont identiques lorsqu’un individu se sent déprimé. La probabilité de partir à la retraite diminue chez ce dernier. Il en va de même lorsque l’état de santé est considéré par l’individu comme bon. Cela influence positivement la décision de prise de retraite. Malheureusement, nos données n’ont pas pu reprendre les individus qui déclaraient leur état de santé comme mauvais ou très mauvais, les maladies chroniques de ceux-ci, leurs craintes de modifications dans la législation des retraites. Il aurait été intéressant d’étudier les effets sur la probabilité avec les données actualisées de ces variables afin de constater si les variables influençaient de la même manière la probabilité de prendre sa retraite.
• Tout comme les travaux de Debrand le mentionnaient déjà, les hommes ont plus eu tendance à prendre leur retraite. Le fait d’être fonctionnaire impacte plus fortement la probabilité de partir à la retraite anticipativement.

Nos résultats ne sont pas généralisables pour la totalité de la population car ils ne reflètent qu’une partie de la population active en 2015 et ayant répondu aux enquêtes Share des années 2015 et 2017.

Les résultats de certaines variables ne sont pas inédits par rapport aux différentes recherches qui ont déjà été réalisées par le passé. Ils confirment qu’un individu retardera sa retraite lorsqu’il a peu de chances de garder son emploi ou que son travail le satisfait. De plus, tout comme les travaux de Debrand et al (2007, 2009), l’individu sera d’autant plus enclin à prendre sa retraite lorsqu’il est un fonctionnaire de sexe masculin.
En outre, notre modèle présente pour certaines variables des résultats contraires à la littérature scientifique existante. Nous n’avons pas d’explication quant à leur cause excepté notre biais de sélection.

Pour conclure, notre objectif était de comparer les déterminants entre les études de Debrand (2007, 2009) et notre étude. Nos modèles et notre base de données ne nous a pas permis d’obtenir les mêmes résultats pour les différentes variables explicatives. Une des explications est que nous n’avons pas pu reconstituer une base de données reprenant toutes leurs variables explicatives. Il aurait été intéressant de pouvoir confirmer la totalité des résultats des recherches de Debrand et al (2007, 2009). C’est pourquoi nos résultats établis avec les deux dernières vagues des études Share demandent à être confirmés.

Les résultats apportés par cette étude sont donc à prendre avec prudence car nous sommes conscients des limites de notre modèle qui a été réalisé avec une base de données très réduite dû à des observations aberrantes ou manquantes.
la date de réponse20 juin 2020
langue originaleFrançais
L'institution diplômante
  • Universite de Namur
SuperviseurJean-Yves Gnabo (Promoteur)

mots-clés

  • Déterminants
  • Retraite

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