La dynamique des groupes littéraires

Les rassemblements d’écrivains constituent un objet privilégié pour l’histoire littéraire et, en particulier, pour celle qui se construit en exploitant les outils proposés par la sociologie. Ces phénomènes de collectivisation permettent d’opérer une jonction entre une approche globalisante de la littérature (qu’elle se fasse en termes de champ ou d’institution) et une étude de ce qui se joue et se passe réellement au cœur de cet univers spécifique. Pour le dire clairement, se pencher sur les mécanismes de constitution des groupes littéraires, sur leurs rites et leurs croyances, sur leurs forces de cohésion et sur ce qui (inévitablement) conduit à leur dissolution, sur ce qui les motive et les fait vivre, sur ce qui leur permet de s’institutionnaliser ou sur ce qui les condamne à l’implosion — en un mot, se pencher sur leurs logiques et leurs dynamiques —, c’est passer d’une macrosociologie à une microsociologie, cette dernière offrant des clefs pour comprendre le fonctionnement du champ à une époque donnée. L’analyse de cette réalité groupale liée au domaine littéraire et qui se laisse appréhender à travers des discours, des attitudes d’adhésion et de rejet, des postures collectives et des rites a fait l’objet de plusieurs analyses spécifiques — depuis telle chapelle parnassienne rassemblée autour du prophète Leconte de Lisle et dont les traditions, tout en récitations et évaluations, rappellent parfois l’univers scolaire, jusqu’aux Surréalistes emmenés doctement par Breton, en passant par les Zutistes libertaires. Ce livre a pour enjeu d’offrir à cette problématique un espace de réflexion systématique et transversal.