Approches philosophiques de la vulnérabilité. Comment penser la vulnérabilité aujourd'hui?

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1/ Depuis quelques années, l’importance du soin et de l’accompagnement des fragilités dans nos sociétés ne cesse de se faire sentir. Nos conceptions contemporaines de la solidarité et des politiques qui la mettent en œuvre ne sont peut-être d’ailleurs pas tant déstabilisées par l’évolution de l’économie, de la biomédecine ou des technologies contemporaines que par cette fragilité même de l’être humain qui se dévoile dans leur ombre. La tendance au développement de politiques sociales d’aide à l’autonomisation et à l’individualisation des personnes vulnérables a constitué à cet égard une première réponse immédiate aux défis qu’a mis à jour ce dévoilement. Parallèlement, au plan théorique, l’expérience des vulnérabilités qui affectent nombreux de nos contemporains dans leurs formes de vies suscite aussi, depuis une dizaine d’années, une nécessaire reformulation des enjeux éthiques et politiques du vivre humain. De nouveaux courants de pensées, comme les théories du care ou les philosophies du soin, réinterrogent plus que jamais aujourd’hui les présupposés implicites des théories modernes de la justice, notre conception du sujet, de la morale et des liens qui font de nous des êtres sociaux.
Les questions suivantes se posent dès lors à nous : qu’est-ce que la vulnérabilité ? Une réalité négative qui frappe certaines individus les obligeant à renoncer à l’autonomie à laquelle tout être humain aspire ? Doit-elle être éliminée afin que une vie puisse être définie comme « bonne » ? Ou, au contraire, la vulnérabilité constitue une condition normale de l’existence humaine qui doit être accueillie afin que cette même existence puisse se dire « accomplie » ? Que nous révèlent donc nos expériences contemporaines de vulnérabilités au sujet de l’être que nous sommes ? Les politiques mises en place ces dernières décennies pour soutenir la solidarité sont-elles suffisamment ajustées à cette nouvelle figure du sujet humain ? Autrement dit, les évolutions pratiques et théoriques se rejoignent-elles ? Ces interrogations appellent-elles une restructuration des rapports qui se nouent entre le soin et le politique ? Entre l’urgence vitale du premier et la nécessité sociale du second, comment penser ou repenser les conditions de la participation démocratique et du rapport des sociétés à la fragilité de ses membres ? Comment enfin aborder le champ de ces questions sans misérabilisme théorique ni victimisation pratique des personnes vulnérables ?
Quelles sont les propositions nouvelles qui émergent au plan philosophique et pratique pour faire face à ce « moment » de la fragilité que nous connaissons aujourd’hui ?
C’est avant tout à cette question que le projet souhaite s’attaquer pour chercher des réponses et de pistes d’actions en vue de faire face aux situations de vulnérabilité auxquelles est exposée de plus en plus massivement la société aujourd’hui.
2/ La seconde question à laquelle le projet veut s’attaquer est celle du rapport entre la vulnérabilité et l’autonomie dans l’existence de tout être humain et donc de la contribution que l’accueil de la vulnérabilité peut éventuellement offrir à la construction de l’identité.
On constate en effet aujourd’hui que nombreux sont les efforts accomplis – au niveau politique mais surtout au niveau des associations et des particulier – pour permettre aux personnes vulnérables de conserver une certaine autonomie. Cela constitue, sans aucun doute, le témoignage que la société répond positivement au dévoilement de la vulnérabilité. Cela nous fait dire que, malgré les manquements qu’on peut encore constater au niveau de certaines infrastructures, l’expérience de la vulnérabilité est aujourd’hui une réalité reconnue et accueillie. Et que cela a rendu possible le développement d’une nouvelle réflexion à propos des enjeux éthiques et politiques du vivre humain, comme le témoignent la mise en place des éthiques du care ou des philosophies du soin, ainsi que la réflexion conduite sur les théories de la justice, la conception du sujet, la construction de l’identité, de la morale et des liens qui font de nous des êtres sociaux.
C’est précisément cette ample réflexion sur le vivre ensemble qui s’est développée ces derniers temps à mettre clairement en évidence les liens étroits existant entre l’accueil de la vulnérabilité et le dévoilement de l’identité de l’homme que nous sommes. La recherche veut montrer que ce lien ne contribue pas seulement à la construction de celle-ci, mais qu’il lui est indispensables. Mise à mal par les crises que traverse la société contemporaine, crise sanitaire, mais aussi économique et financière ; crise du « politique » et du lien social ; crise climatique enfin, avec son lot d’incertitudes concernant le futur de la planète et son éventuel effondrement, la construction de l’identité devient en effet centrale, non seulement pour chaque vie humaine, mais aussi pour la survie de la société en tant que telle.
Des questions s’ouvrent ainsi devant nous : face aux crises, qui dévoilent de plus en plus la vulnérabilité de tout un chacun, mais aussi des nos construction sociales et politiques, peut-on encore affirmer que l’homme « réussi », celui dont l’identité serait complètement construite, est l’individu autonome et indépendant, capable de se donner un projet de vie et de le mener à bien ? Face à ces crises, qu’est-ce que l’accueil de la vulnérabilité peut-il apprendre à propos de la « réussite » de vie et de l’identité de l’Homme que nous sommes ?
Titre abrégéVulnerabilité
statutEn cours d'exécution
Les dates de début/date réelle20/05/13 → …