La loi d’Okun s’applique-t-elle au niveau des régions européennes ?

  • Mamadou BAH

Student thesis: Master typesMaster in Economy: General, Professional focus

Abstract

Le produit intérieur brut des États-Unis entre le début de l’année 2003 et le premier trimestre 2006 a augmenté chaque année à un taux moyen de 3,4 %. Et comme on pouvait s’y attendre, cela a entrainé une baisse du taux de chômage. Pendant l’année qui a suivi, la croissance moyenne a diminué atteignant la moitié de son taux antérieur. Malgré la baisse de l’activité économique, le taux de chômage a continué à baisser, ce qui représentait un problème dans les prises de décisions des politiques et des économistes (Knotek II, 2007). Généralement, selon les enseignements d'Okun, et la loi d'Okun en particulier, une croissance économique accrue entraîne une baisse du taux de chômage. Arthur Melvin Okun né en 1928 dans le New Jersey, était un professeur d’économie à l’Université de Yale. Il siégeait au Council of Economic Advisers (CEA), et était conseiller du président John Fitzgerald Kennedy. Partisan de la pensée keynésienne, Okun estimait que la collecte et la dépense des recettes de l’État était un meilleur moyen d’influencer l’économie que la politique monétaire. Pour les keynésiens, l’État doit intervenir de façon régulière pour le bon fonctionnement de son économie et maintenir ainsi sa croissance élevée. Lors de la crise des années 1960, le CEA dans son rôle de conseiller, préconisait de faire baisser les impôts dans le but de stimuler la consommation des ménages. Ses travaux ont ainsi guidé le Président Kennedy dans sa politique d’allègement fiscal en vue de relancer la demande (Britannica, 2021). Les décideurs politiques sont constamment à la recherche du plein emploi et espèrent ainsi réduire le niveau de chômage. Cependant, les différentes décisions et stratégies mises en place pour réduire le taux de chômage influencent également la demande et la production nationale. Dans sa tentative de réponse à la question « quelle quantité de production dans les conditions de plein l’emploi l’économie peut produire ? », Okun utilise le produit national brut potentiel (PNB potentiel) qui est un indice des capacités réelles de production de l’économie et l’écart entre la production potentielle et la production réelle. Les résultats de ses recherches ont abouti à une relation négative entre la croissance économique et le chômage qui est devenu par la suite « la loi d’Okun ». Elle stipule qu’une augmentation de 3% du taux de croissance économique au-dessus du taux de croissance potentielle à long terme entraîne une baisse de 1 % du niveau de chômage (Okun, 1962). Autrement dit, une augmentation du taux de chômage de 1 point de pourcentage entraîne une baisse de 3 % du produit intérieur brut réel. De plus, pour lui, il semble y avoir un grand consensus sur l’objectif raisonnable d’un taux de chômage à 4 % mais peu d’accord sur les étapes d’analyses conduisant à cette conclusion. Sa cohérence dans l’explication de la relation entre le taux de chômage et le produit réel ainsi que sa stabilité dans la prédiction du plein-emploi au cours du temps, a fait de la loi d’Okun, une loi acceptée par la plupart des économistes. Au cours du temps, plusieurs études économiques ont été menées sur le sujet. Les résultats vont généralement dans le même sens avec un lien négatif entre le chômage et le produit intérieur brut. Néanmoins, comparé au résultat obtenu par Okun, certaines études divergent en ce qui concerne la valeur de son coefficient. C’est le cas de Gordon 1984, Prachowny (1993), Weber (1995) et Moosa (1997), (Freeman, 2000), (Noor, 2007). La relation de base entre le produit intérieur brut et le chômage a principalement été conçue de manière linéaire unanimement. Mais certaines études récentes suggèrent un lien asymétrique entre ces variables. L’impact sur le coefficient d’Okun dans ce contexte dépendrait de la situation de l’économie (Courtney (1991), Lee (2000), Harris et al. (2001), Caraiani (2012), Kangasharju et al. (2012)). Bien que la plupart des études aient été basées sur la validité de la loi au niveau des États-Unis, elle a également été vérifiée par d’autres auteurs (par exemple Moosa, 1997) au niveau des États d’Europe et des pays du G7. Quelques études ont tenté de vérifier la validité empirique de la loi au niveau régional. C’est le cas de Freeman (2000) sur les États americain, Apergis et al. (2003) et Christopoulos en Grèce, Villaverde et al. (2009) sur les régions d’Espagne, Adanu (2005) sur les régions du Canada, Binet et al. (2013) sur les régions Française. Les résultats de la plupart de ces études confirment une disparité entre les régions. Pour une partie des régions, la loi est conforme aux prédictions d’Okun pour une autre, la loi ne s’applique pas. Cependant, dans un même travail empirique, peu d’études ont tenté de vérifier la validité de cette loi au niveau des régions de plusieurs pays. Ainsi, notre objectif dans ce travail est de tester la validité de la loi au niveau des régions de l’Europe ? Mais à la différence des travaux de Durech et al. (2014) sur les régions de deux pays (la République Tchèque et de la Slovaquie), nous choisissons de faire notre analyse sur un panel de 127 régions de 11 pays d’Europe. Les données utilisées débutent de 2001 à 2019 et comprennent 19 périodes. De plus, compte tenu du probable lien entre le nombre de personnes vivant dans une région et le taux de chômage de cette région, nous avons décidé d’introduire la densité de chacune des régions dans notre analyse. Dans notre travail, nous utilisons la méthode d’écart pour modéliser la relation entre le chômage et le produit intérieur brut. Ensuite, avec le filtre de Prescott-Hodrick, nous détachons les tendances des cycles économiques des variables étudiées. Et enfin, par la méthode des moindres carrées ordinaire (MCO), nous effectuons nos régressions. Les principaux résultats de notre analyse confirment la validité régionale de la loi d’Okun dans la majorité des régions de notre échantillon. Elle constitue donc un élément robuste dans toutes démarches visant à comprendre le chômage. La suite de ce mémoire sera structurée de la façon suivante : dans le chapitre I, nous détaillerons les travaux d’Okun ainsi que certains éléments d’analyse en rapport avec notre sujet. Dans le chapitre II, nous passerons en revue la littérature ; le chapitre III portera sur l’analyse économétrique et terminerons notre travail dans le chapitre IV par conclusion.
Date of Award30 Aug 2022
Original languageFrench
Awarding Institution
  • University of Namur
SupervisorMarcus Dejardin (Supervisor)

Cite this

'